Le ciel s'assombrissait à l'Ouest alors que la région du pays de l'eau n'était chaque jour que plus brumeuse. Rien d'autre qu'une eau stagnant dans les airs, immuable et inatteignable par une personne normale. Ce fut sous ce voile d'eau en suspension et dans le brouillard de ses pensées que Mikami posa pied à terre, sur le sol humide d'une île recouverte d'une très légère végétation et parsemée de surfaces rocailleuses, tirant de sa main droite la petite barque et la rame qui lui avait servies à arriver jusqu'ici voguant au hasard des contrées de Mizugakure, la main gauche posée sur sa ceinture et le torse bombé. Il la lâcha sur la terre ferme, l'abandonnant pour un certain temps en lisière de cette île qui semblait déserte. En tout cas le Kurorai ne détectait aucune présence, et la brume épaisse dans laquelle il se trouvait illustrait bien son état d'esprit. Rien de tranquille, comme nimbée de mystère, sa mémoire lui faisait défaut et il lui était impossible de fouiller son passé. Pourtant le temps qu'il passa à arpenter le monde shinobi auquel il se sentait appartenir lui permit de tirer quelques bonnes conclusions.
Pour résumer la situation, Mikami se sentit réapparaître il y a de cela bien des semaines, dans un des pays au Nord du pays du feu. Allongé dans une chambre modeste, apparemment recueilli par une personne d'une cinquantaine d'année, soigné d'un rude combat par cette même personne, il n'avait à l'esprit que ce que la nature ne voulait lui montrer. Rien d'autre, juste un vide désastreux qui semblait avoir tué la personne qui vivait avant dans ce corps. Mais le jeune homme ne découvrait rien au monde, et son corps lui était bel et bien familier. Après une courte discussion avec la personne l'ayant accueilli, tout de même déstabilisé au point de ne plus voir tout ce qu'il y avait autour de lui, il s'en alla d'un pas rapide et titubant, comme fuyant, ou courant après un but invisible.
Mikami retourna voir cette personne plus tard lors d'une journée qui s'avérera plus tard plus que fructueuse.
Et le temps qu'il avait passé à errer sur ces terres lui permis de comprendre plusieurs choses et de constater des profils intrinsèques de la personne qu'il était depuis sa naissance, et non pas depuis le jour de sa renaissance. Sa mémoire avait beau avoir été effacée, son caractère lui semblait couler de source et même certains mouvements parfois surprenants semblaient découler du naturel.
Ce fut ainsi qu'il sauta sur un rocher en hauteur où il cassa une branche de bambou en l'attrapant d'une main et la brisant d'un coup de pied puissant, et s'asseyant légèrement sur la roche surplombant un buisson, déposant la branche de bambou entre sa ceinture et son pantalon, sur la gauche. Ce n'était pas la première fois que le jeune homme se surprenait à tenter comme naturellement une tel manœuvre avec un objet de ce genre, ou même un sabre ennemi. Ceci entre autres techniques de ninjutsu et taîjutsu, ainsi que des déplacements. Mais plusieurs fois il avait médité en se fixant entrainement ou combat au sabre comme fil conducteur sur le chemin de ses jours passés. Mais jamais il ne se souvint du moindre détail, alors qu'il connaissait certaines techniques de type raiton sans avoir eu à recourir à du papier sensible au chakra pour le savoir.
Assis en tailleur, Mikami déposa le bambou sur ces genoux et y reposa ses mains alors qu'il fermait les yeux. Étant devenus instinctives, certaines techniques de combat apparaissaient de la même manière que des réflexes avaient refait surface dans les situations appropriés. Pourtant il lui était souvent arriver d'échouer à certains jutsu dont l'utilisation lui semblait naturelle. Il n'en a donc le souvenir que de choses inachevés comme s'il manquait des éléments, comme les fois où il se sentait dégainer un sabre qu'il n'avait pas sur lui. Le peu de fois où il tint entre les mains le sabre d'un ennemi il fit des ravages, mais il ne ressentit pas une seule fois le besoin de le garder alors que ses réflexes inconnus de kenjutsu pesaient à chaque fois dans la balance.
Ne fixant même plus l'intérieur de ses paupières, le Kurorai reliait mentalement tous ces genres de constats qu'il fit ces derniers jours, en plus des émotions qu'il ressentait normalement et le peu de sentiments qui ne daignait faire surface. Comme une détermination à toujours avancer, ce mental agressif qu'il avait lors des combats, comme voulant toujours marcher sur le pied de l'adversaire. Impossible de le défaire de cette loyauté qui l'imprégnait, sûrement le guiderait-elle un jour.
Petit à petit il essayait d'accorder les quelques fils de l'immense toile d'araignée que constituait la personne qu'il était, et ce depuis sa véritable naissance. Le vide dans lequel il se trouvait était inacceptable et il ressentait une forte détermination à poursuivre ce qu'il avait commencé avant l'incident. Alors que même Yarate, la personne l'ayant remis sur le circuit du monde shinobi le jour où il se réveilla ne put rien lui apprendre, Mikami faisait appel à l'habileté de son esprit pour reprendre le court de sa vie, assis non loin de la bordure de l'île par laquelle il avait accosté...